ITW Rémy Biechel (1ère partie) : « On est à  la limite de l’incroyable… »


ITW Rémy Biechel (1ère partie) : « On est à  la limite de l’incroyable… »

Interview exclusive de Rémy Biechel, pilier de la Team BarrierePoker.


 
Alors que la Team Barrière vient d’être reconduite pour un an, nous avons rencontré le pilier de cette équipe : Rémy Biechel. Un joueur à la mentalité exemplaire qui analyse avec lucidité son parcours lors des dernières années, son rôle au sein de la Team et nous dévoile sa vision du statut de joueur pro et ses ambitions à venir. Première partie.

Bonjour Rémy, peux-tu revenir sur ton parcours ?

J’ai 43 ans et à quatorze ans, je faisais déjà mes premières parties de tarot, de rami ou de belote. J’ai commencé le poker à l’âge de 17 ans et j’étais très bon au poker fermé. J’ai démarré le Hold’em dans les parties privées et ça fait maintenant trois ans et demi que j’ai arrêté de travailler. J’étais salarié, pas mal payé, tout allait bien. Je faisais partie de la classe moyenne. Mais après j’ai fait ma plus grosse perf’ dans le 5000 € de l’EPT Monte-Carlo et j’ai commencé à badrunner en 2009. 

Comment as-tu appris à jouer ?


Je faisais des petites parties à 30 € à l’époque. J’ai dû perdre 6000 € car je n’y comprenais rien du tout, comme au poker fermé au début. Mais j’ai vite fait des résultats en tournois. Je faisais des parties assez intéressantes financièrement. Je n’étais pas riche, j’ai perdu mon temps en cash-game. Le fait de bluffer souvent m’a permis de faire pas mal de résultats à l’époque. Je jouais beaucoup, comme un fou. Pendant un an et demi, je dormais 4h par nuit. C’était quand même calculé, je savais pertinemment qu’il fallait payer pour apprendre à jouer. Je ne faisais que du live, sans lire aucun bouquin. Apres j’ai déménagé sur Paris et j’ai pris 40.000 € sur les tournois au Cercle Gaillon. J’ai été repéré par quelqu’un qui m’a proposé de me stacker pour des événements plus prestigieux. J’ai eu la chance de faire le 25k du Bellagio par exemple. Ça me manque un petit peu, mais j’ai revu mes prétentions à la baisse pour tenir sur le long terme.

Te sens-tu obligé de changer de façon de jouer pour t’adapter au poker moderne, malgré ton expériece ?

J’ai beaucoup évolué. Même maintenant, quand j’ai un point d’interrogation, je vais voir ElkY par exemple, ou Adrien Allain, qui est un prodige. Je suis au niveau, je suis sûr que ma façon de jouer suffit à faire des résultats. Quand on décortique mes coups avec mes proches, tout le monde me dit qu’on est à la limite de l’incroyable. Quand je vois comment je sors le plus souvent… Je n’ai pas de solution. Et elle n’est pas à travers l’évolution de mon, jeu, même si je ne joue pas à la perfection. Je dois juste éviter de prendre des 2-outers. Pour être au niveau, il faut aussi jouer beaucoup online. Cela fait un an et demi que je ne fait presque plus que du cash-game online, pour pouvoir évoluer. Si je reste dans mon domaine, les jeunes du net vont s’adapter au live et je serai vite dépassé. Je suis le plus gros racker de BarrierePoker.fr. Je suis parti d’un bankroll vierge et j’ai monté progressivement de limite.

Tu as une réputation de joueur malchanceux dans le milieu. Cela joue t-il au final sur ton mental ?

J’ai eu un gros problème en 2010, je n’en pouvais plus. J’ai été obligé de prendre les services d’un coach mental qui m’a fait énormément de bien. Il m’a appris à m’aérer la tête, c’était limite de la sophrologie. Une chose qui m’a fait beaucoup de mal à un moment, c’était le sentiment malsain de whiner en sortant d’un tournoi. Maintenant, j’arrive à encaisser vite et à passer à autre chose. Je m’en suis aussi servi pour me forger un mental. J’ai envie d’être un champion. Comme tous les athlètes de haut niveau, le mental peut faire la différence. On sait tous pertinemment qu’au poker il y a de la variance. J’ai vu ElkY ne pas faire un résultat pendant huit mois. Au Main Event à Vegas, je perds set over set, puis je prends un 2-outer à Cannes pour les WSOPE. J’ai pas envie de changer mon jeu quand je ne fait pas d’erreur. J’analyse beaucoup mes tournois. J’ai dû faire 7 bulles et finir 15 fois proche de l’argent. Pas parce que je ne prends plus de risques, mais parce que je perds tous les coups clés. Quand ça me rend crippled, je joue plus serré. Faire des bulles, c’est déjà énorme… Le niveau s’est bien relevé, du coup la variance est plus importante quand ça se passe mal. Mais j’ai un mental d’acier…

Quel bilan tires-tu de ton année 2011 ?

Le bilan est globalement négatif, je ne suis pas content de mes résultats. J’ai dû prendre 80k en 2008 et 2009, et à peine 50k en 2010 et 2011. Si je refais les mêmes années, je ne l'accepterai pas. Danc ce cas, je prendrai des décisions à la fin 2012. Quand tu es sponsorisé, tu te dois aussi de faire des résultats. Depuis deux ans, je dois être à peu près even.

Penses-tu que Yann Migeon était le meilleur choix comme BarrièrePoker Player 2012 ?

Je suis bien placé pour te répondre car je faisais partie du jury. Il se présentait pour la 5ème fois, c’était compliqué pour les autres de s’en sortir. Je trouve que c’est un très bon choix. Il y avait Christophe Lesage, qui a fini sur le podium, qui est quelqu’un de très bien, d’autres plus ou moins favoris… Le but du casting n’était pas de recruter le meilleur joueur avec les meilleurs perfs’. Avec Yann Migeon, on a récompensé la fidélité, il joue beaucoup dans les casinos du groupe Barrière, notamment à Deauville. C’était la troisième fois consécutive qu’il se qualifiait pour la finale, l’année dernière il était sur le podium. Il joue beaucoup sur le site ce qui est un point très apprécié par notre direction. Il est humble et représente les valeurs de Barrière. On aurait pu prendre cinq joueurs, et il a fallu faire un choix. Il n’est pas au top certainement, mais il a un potentiel et on va essayer de l’amener un peu plus haut. Il s’est bien intégré à la Team. Il faut correspondre à une certaine image : moi je ne fais pas de résultats, et mon sponsor me fait encore confiance, mon image doit correspondre à leurs valeurs. Si tu es champion du monde et que tu dis merde à ton patron, ça ne passera jamais…(rires). Aujourd’hui, certains jeunes joueurs n’ont pas compris qu’il y a des règles à respecter.

Retrouvez la seconde partie de l'interview jeudi 9 février.

Propos recueillis par Maxime Arnou
 

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