ARNAUD PEYROLES : Tu progresses plus en serrant des millions de mains qu'en jouant des millions de mains


ARNAUD PEYROLES : Tu progresses plus en serrant des millions de mains qu'en jouant des millions de mains

Nous avons rencontré celui qui est indéniablement le joueur du mois, multipliant les perfs depuis le début de l'année, et tout récent vainqueur du Crazy 8 au Club Barriere.


Arnaud bonjour,

On se connaît bien, on ne te présente plus, mais petit résumé quand même :
Tu es un Entrepreneur reconnu (Arnaud a fondé Ideactif, entreprise spécialisée dans le marketing sportif ; organisatrice entre autres de la caravane du Tour de France), tu as été un grand champion de sport automobile (vainqueur GT3 au 24h de Spa notamment) et aujourd’hui tu es passionné de poker.

Parmi ces trois activités, laquelle est la plus difficile ?

Elles ont toutes été aussi passionnantes, engageantes, difficiles. Ce sont trois maîtresses complètement obsédantes. En fait tu ne leur échappes pas. Tu survis à leur attraction monstrueuse. Et c’est pour ça qu’on adore ça. Entreprendre c’est ma vie et ça le restera toujours. Je me suis passionné pour la course auto et aujourd’hui c’est le poker. Parce que tu es aux prises avec des forces qui te dépassent en permanence. Et c’est ce qui caractérise les trois. C’est l’Iliade et l’Odyssée. Tu es en mode survie, inutile de résister à la passion du poker, je vis avec désormais.

La vie d’entrepreneur prend énormément d’énergie, Comment arrives-tu à lier tout ça ?

J’essaye d’avoir un plan de vie. Mais finalement tu passes ton temps à t’adapter aux événements où il faut s’adapter. Pour jouer ou piloter il te faut énormément de force mentale pour surmonter l’échec et la frustration. Le secret c’est de rester Zen. En tous cas de tenter d’y parvenir. Toujours est-il que je ne suis heureux que par ce que je peux et jouer au poker et être entrepreneur. Mais il n’y a pas un cas où je me projette dans une vie où je ne ferai que jouer, comme c’est le cas de certains de mes potes. Je suis inadapté à ça.
 

Compliqué de lier ces deux vies qui prennent énormément de temps ?

Non parce qu’elles sont complémentaires. Dans l'entreprise tu passes ton temps à essayer de mobiliser toutes les énergies pour créer de la valeur. Et faire travailler les gens en équipe. Tu es dans une construction positive.

Le poker c’est tout le contraire :
Tu ne penses qu’à ton intérêt. Et tu es là pour plumer tous les mecs qui sont assis à ta table, et plus tu vas les tromper, le mieux ça marchera. C’est le principe du sport, du rugby, de la boxe, du tennis. C’est de pouvoir s’affronter ultra violemment mais dans un cadre très réglementé. Vraiment la seule chose qui t’intéresse au poker, c’est de piquer les jetons de tes adversaires ; leur faire croire le contraire de ce qui se passe vraiment. Enfin c’est également récréatif et à la fois hyper sérieux. Car dans la compétition comme dans l’entreprise tu ne peux pas faire les choses autrement que sérieusement.  Les deux sont très complémentaires, je lai déjà dit.  Mais pour moi le poker c’est un véritable art martial., un art qui doit te guider vers la bonne décision.
 
Toi qui ne laisse rien au hasard dans ta vie, quelle est sa part dans le poker ?

Le poker n’est qu’un jeu de décision et non pas de hasard. La meilleure preuve est que tu ne bluffes pas le hasard. Le hasard n’a aucune prise ici. D'un côté, le bluff n’amène que la décision de l’adversaire. Mais c’est toi qui décides quand le faire et à quel moment. Il paye, il fold, peu importe tu as pris la bonne décision. Comme un joueur de tennis qui tente son passing, ça passe ou pas ensuite, mais le hasard n'intervient pas.

En quoi le poker t’aide dans l’entreprise ?

Souvent je pense que je ne pourrai faire que ça (jouer). Mais au bout de quatre jours, je rêve de retourner dans l’entreprise. Et inversement. A la fin de la semaine je n’ai qu’une envie : celle de courir m’inscrire au tournoi. Le poker m'aide énormément car c'est une arme de guerre dans la négociation. C’est une école de manipulation. Ça te forme à la négociation bien sûr mais aussi à la maîtrise de soi, à l’analyse du risque, à l’analyse de la situation, à la synthèse. Pour le seul but ultime dans les deux domaines : la prise de décision.


J’aimerais comprendre un petit peu la relation de ta passion pour l’automobile et celle pour le poker. Le pro Tom Mc Evoy disait : « Le poker est l’activité la plus violente que l’on peut faire assis ». Tu es d’accord ?


Quand tu pilotes, tu peux te briser les vertèbres. T’en es conscient, mais tu t’en fous. Il est clair qu’un bluff est moins dangereux. Mais très paradoxalement, je n’ai jamais eu peur en course auto. Alors qu’il m’a fallu longtemps pour ne plus avoir peur au poker. Je travaille même mon mental pour éviter ces peurs dans certaines situations. Mais cette peur est également indispensable. Je fais de la sophrologie, de l’hypnose depuis cette année. Je travaille sur ces situations de jeu.

Car il fallait que je franchisse un cap. J’étais limite techniquement et je le suis toujours. Mais je travaille mon mental. C’est indéniablement ma force. Les joueurs online sont surdoués et jouent des millions de mains. Honnetement leur technique  très avancée est indiscutable. je suis très impressionné. Mais les très jeunes n'ont pas non plus le vécu qu’on a. Ils jouent des millions de mains, moi en tant que chef d’entreprise, je « serre » des millions de mains. Et c’est la vraie différence. J’ai toujours un enjeu derrière : vendre, acheter influencer, fédérer, apaiser. Online tu n’as que l’avantage de l’analyse technique. Je ne suis pas complexé de ne pas avoir toutes les réponses techniques mais j’ai d’autres avantages.

Tu me disais en début d’année. Je suis proche de la victoire et je n’arrive pas à la décrocher. Tu as enfin franchi ce cap ?

C’est un vrai palier ! Les planètes doivent être alignées. Pour que ça se présente, il faut déjà atteindre pas mal de TF. Multiplier les occasions d’être en situation de victoire. Et ça se produit parce que tu vas réussir à saisir l’opportunité. C’est là où j’ai peut-être franchi le cap et progressé.
J’avais déjà travaillé le truc pour être ITM il y a plusieurs années, c’était la première étape. Ainsi il m’arrive de ne pas jouer et que les autres fassent le taf a ma place. A chaque main quand tu arrives un peu plus loin, tu te laisses progresser vers les places payées. C’est ce que j’appelle les minutes de passage. Une Prise de risque assumée, si je la passe, je franchis un palier. Je fais le taf. Et je peux à nouveau ralentir.
Il n’ y a pas si longtemps, arrivé en demi finale, j’étais dépassé, assez limité. Alors j’ai recommencé à travailler la technique. J’ai retravaillé les ranges, les mains à exploiter.

Quel est ton profil ?

Livetard +++. Tout le monde se fout de la gueule des Entram’s. On est old school, et pour certains assez prévisibles. Mais finalement un Polito ou un Lakdari que j’adore voir jouer, sont des virtuoses. Ils maîtrisent une connaissance de l’humain combinée avec la maîtrise du poker. Pour moi ils ont la bonne direction et je trouve que le niveau parisien est très respectable. En tous cas largement égal à ce que l’on peut trouver sur les tournois internationaux.

Quel est ton meilleur souvenir ?

Ce week-end lors de cette victoire sur le Crazy 8. Il y’a eu plusieurs coups clé. Le dernier n’a aucun intérêt. Il à A4, j’ai   . Et hop le 9 tombe et c’est la victoire. C’est une sensation incroyable. Une addiction dont je ne me passerai jamais plus. Plus forte que la victoire en course auto.


Détaille nous un peu cette finale

J’ai fait pas mal de Hero calls en Day2. J’ai récolté aussi le fruit de mes bluffs. Car j’ai eu la conviction de bien faire. Sans doute aucun, je ne me pose pas de question. Je suis dans une espèce d’harmonie d’ensemble de mon jeu. Je sais que je dois être dans ce rythme là. Même si j’avoue qu’en HU j’ai été 2-3 fois très content de ne pas être payé. A trois lefts je rentre dans une histoire avec   . Je pousse, je suis juste illisible et j’ai l’extraordinaire chance de toucher mon full. Mon adversaire me dit « on fait Jamais un sizing comme ça avec un 8 ». Je lui réponds : « Ben si car je suis dans une logique où je ne veux jamais que tu comprennes ce que je fais. Donc j’ai atteint mon objectif. »
 N’importe quel Entram se serait méfié. Mais ce joueur hyper talentueux, monstre de technique ne pouvait pas entrer dans cette logique. En tous cas s’en douter. Et la chance était de mon côté.

C’est comme ça le poker !

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