PSYCHO : Restez focus ! Part I


PSYCHO : Restez focus ! Part I

Après avoir fait ses preuves de coach mental en s’occupant des plus grands sportifs français, Pier Gauthier a décidé d’appliquer ses méthodes dans le poker.

Après avoir fait ses preuves de coach mental en s’occupant des plus grands sportifs français, Pier Gauthier a décidé d’appliquer ses méthodes dans le poker. Cet ancien athlète de haut niveau a notamment obtenu beaucoup de succès avec le Team Winamax, avant d’accepter de partager ses connaissances pour les lecteurs de LivePoker.

 

Chaque mois ou presque, il vous expliquera ainsi comment vous forger un mental de champion pour booster vos résultats cartes en main. Maintenant que vous savez jouer avec la peur suite à son article d’avril, Pier vous livre la recette pour rester concentré sans jamais vous disperser lors d’une partie de poker.

 

« Chaque instant de notre vie est essentiellement irremplaçable : sache parfois t’y concentrer uniquement. » Sur cette citation d’André Gide, nous allons aborder le sujet complexe de la concentration !

 

Un pré-requis

 

Avant toute chose, pour pouvoir bien vous concentrer, vous devez au préalable maîtriser votre sujet, votre technique ou condition physique et être un minimum expérimenté dans ce que vous vous apprêtez à faire. Sans maîtrise technique, pas de concentration possible ou alors il faudra repasser par la case apprentissage alors n’hésitez pas à réviser les bases du poker avant de lire cet article. Mais vous aurez besoin de concentration pour bien apprendre, comme quoi vous n’y échapperez pas…


Qu’est-ce que la concentration ?

 

Le contraire de la concentration est la dispersion, l’éparpillement. Vous connaissez ça très bien, et ce depuis l’école ! Cela revient à laisser les événements prendre le pas sur vous, vous mener, à passer d’une idée à une autre. C’est comme ne pas diriger son sujet, sa vie.

 

Pourtant vous avez déjà éprouvé cet état de fusion, de rétrécissement du champ de conscience ou nous ne faisons qu’un avec la situation. Vous saurez naturellement vous concentrer si on vous annonce que vous pouvez gagner au loto à la seule condition de se rappeler dans les cinq minutes les six chiffres qu’on va vous annoncer maintenant. Parce que tout votre être sera centré sur un but, avec une motivation forte et des conséquences agréables pour votre vie.  Vous n’entendrez plus rien d’autre, vous ne verrez que les chiffres dans votre tête, vous allez même créer naturellement des associations !

 

Soutenus par une motivation forte (gagner au loto) vous ne pensez qu’à une seule chose : mémoriser les six numéros et… vous y arrive !

 

Voilà, ce n’est pas plus compliqué que cela : avoir une motivation forte (issue d’un objectif plaisant et adapté), une idée claire de ce que vous avez à faire pour l’atteindre (plan de jeu, intentions précises, stratégie,…) et ne penser qu’à cela (être uniquement dans le présent).

 

Mais alors, quelle est la difficulté ?

 

« Mais concentre-toi, bon sang », vous êtes-vous entendu dire depuis tout jeune par vos parents, vos entraineurs… Ou  par vous-même !

 

Pratiquement tous mes clients ressentent la nécessité de travailler leur concentration. Ils savent que c’est une des conditions indispensables pour une performance optimale (d’ailleurs chaque champion que j’ai observé possède une grande capacité de concentration). Ils ont des demandes fortes sur leur niveau de concentration, encore plus au poker où on entend souvent que la moindre saute de concentration peut coûter très cher » (le tournoi ou de nombreuses caves si difficilement gagnées). Ils en arrivent ainsi à penser qu’être bien concentré (comme un champion), c’est être concentré tout le temps, parfaitement. 

 

Grosse erreur ! Ils courent après une tache impossible ! Cet état illusoire de concentration étant si difficile (impossible) à atteindre, ils développent des stratégies pour se concentrer qui les précipitent vers ce qu’ils redoutent : la déconcentration ! 

 

En effet, recherchant un état de concentration parfait et ressentant que c’est très compliqué, ils finissent par penser que cela demande une grande préparation. Récemment, une des meilleures judokate française qui avait du mal à se concentrer pleinement pour ses combats de quelques minutes, me demandait de l’aider à mieux se concentrer. Elle m’expliquait que son entraineur lui demandait de se mettre dans « sa bulle » au minimum ¾ d’heure avant un combat. Elle devait ne parler à personne et ne penser qu’à son combat. 

 

Quelques questions allaient lui faire prendre conscience que ce n’était sans doute pas la bonne stratégie :

 

Comment cela se passe-t-il pendant les 45 minutes avant ton combat ?

C’est très difficile, je n’arrive pas à penser uniquement à mon combat. Je commence à penser à autre chose, aux conséquences de ce match et cela me stresse.

Comment te sens-tu quand tu entres sur le tatami ?

Epuisée !

As-tu vu Teddy Riner avant un combat et fait-il la même chose ?

Non, il écoute de la musique, parle et rit avec certaines personnes de son entourage jusqu’au moment où il est appelé à combattre. A ce moment, son visage change, il a l’air d’être pleinement concentré !

 

Nombreux sont les sportifs qui comme elle pensent qu’il faut une longue mise en condition pour être concentré. Ils s’épuisent avant la compétition pour atteindre cet état et redoute pendant l’action la moindre déconcentration. Cela est compréhensible car s’il faut 45 minutes pour se concentrer, mieux vaut ne pas se déconcentrer !

 

Mais alors comment font ces champions pour se concentrer et de quoi ont-ils besoin ? Vous vous êtes déjà tous rendu compte en lisant un livre que par moment après 10 pages lues, vous ne savez absolument pas ce qu’elles racontent ? Que s’est-il passé ?

 

Par manque d’intérêt ou à cause de quelque chose de plus important que votre livre, votre esprit a simplement commencé à vagabonder sur d’autres sujets : ce que vous allez faire ce soir, la remarque désobligeante de votre patron hier, vos prochaines vacances…

 

Il y a donc une notion de temps et d’intérêt qui est capitale à comprendre. Etre concentré, c’est simplement penser à ce que vous avez à faire maintenant (présent). Etre déconcentré c’est penser à ce que vous avez fait (passé) ou ce qu’il se passera plus tard (futur). La bonne nouvelle est que pour penser à ce que vous avez à faire maintenant, il vous suffit de le décider et cela prend 1/10ème de seconde. Vous n’avez donc pas besoin de vous isoler pendant 45 minutes seul dans un vestiaire. D’autant plus que la capacité moyenne de forte concentration d’un adulte est d’environ 20 minutes. Quand votre cerveau est concentré, il brûle beaucoup d’énergie (glucose, sang et oxygène) et s’épuise donc plus rapidement. Par conséquent, si vous cherchez à vous concentrer pleinement avant l’action, vous risquez d’être dans l’incapacité de maintenir votre concentration quand vous allez en avoir réellement besoin.

 

Mais alors comment fait un champion de tennis pour se concentrer pendant un match de 4 heures ? 

 

Et bien tout simplement, il n’est pas concentré pendant 4 heures, mais simplement quand il en a réellement besoin, c’est à dire pendant les phases de jeu (ce qui ne représente réellement que 20% du temps de match). Il a appris à maitriser son cerveau et ses pensées. Il pense à ce qu’il a à faire (intention de jeu) au moment où le point démarre et pendant toute la durée de celui-ci (5 secondes en moyenne) et il se relâche entre 2 actions de jeu (25 secondes) ou quand il change de coté (1m30). Il est ainsi capable de maintenir une bonne concentration dans la durée quand il en a vraiment besoin (l’action). 

 

Pour réussir cela, il lui est par contre nécessaire, de connaître exactement ce qu’il fait quand il joue bien (intentions, stratégie, plan d’action,…) et d’être fortement intéressé par la tache à effectuer (plaisir de jouer, travail sur les objectifs pour décupler la motivation). C’est d’ailleurs une des raisons qui fait que les grands champions sont plus efficaces dans les matchs importants car l’intérêt est plus grand.

 

Arrive-t-il au champion de se déconcentrer ?

 

Bien évidemment ! Comme tout le monde ! 

 

Nous avons vu que l’axe Passé-Présent-Futur était important à maitriser. Un champion peut également avoir tendance à rester dans le passé (balle de set ou beaucoup de jetons perdus, bad beat ou injustice, faute d’arbitrage,…) ou à se projeter dans le futur (si je gagne, c’est bon pour moi : argent, points, reconnaissance, notoriété, …). C’est humain !

 

Il a simplement appris à se focaliser dans le présent (rapidement) et à identifier quand il reste bloqué dans le passé ou quand il se projette dans le futur. Il arrive donc à se reconcentrer beaucoup plus vite. Quand certains se frustrent de s’être déconcentré (pensant qu’il va leur falloir à nouveau un long moment pour se (re)concentrer) ou restent de longs moments dans le passé ou le futur, le champion accepte de se déconcentrer, identifie rapidement si ses pensées se situent dans le passé ou le futur et revient ainsi rapidement dans le présent. En effet, même s’il arrive souvent à Roger Federer de se déconcentrer, cela ne dure en général que quelques points, alors que d’autres vont s’énerver sur une faute d’arbitrage ou une opportunité ratée pendant plusieurs jeux voir la fin du match.

 

Comme le disait Yannick Noah : « L’art de la concentration est primordial, ici et maintenant, telle est la clé. »

 

A suivre... 

 

Par Pier Gauthier, coach mental professionnel

 

Ancien joueur de tennis professionnel (18ème Français), Pier Gauthier a lui-même travaillé avec un coach mental pendant cinq ans. Après voir arrêté sa carrière à 26 ans pour des raisons de santé, Pier décide de se mettre à entraîner en utilisant ses méthodes de coaching mental très peu utilisées à l’époque. Tout en se formant au coaching mental (Master en PNL, certification en coaching), il commence à entrainer des jeunes de sa région, qui deviennent très rapidement les meilleurs de la ligue. Cette progression attire un joueur d’une autre ligue, Cyril Saulnier, qui passe en six mois de la  900ème place au classement ATP à 90ème mondial. Pier coache plusieurs des meilleurs joueurs français comme Sébastien Grosjean, Gaël Monfils, Mickael Llodra, Lionel Roux … Le point d’orgue reste sa collaboration avec Sébastien Grosjean en 2001, permettant au n°1 français de réussir sa meilleure année sur le circuit. Pier se positionne ensuite uniquement en tant que préparateur mental en intervenant dans d’autres disciplines (foot, golf, voile, équitation, …), les résultats obtenus prouvant que l’aspect mental était déterminant. En 2010, Pier est sollicité par le Team Manager de Winamax Stéphane Matheu. Le premier joueur à s’investir est Manuel Bevand et ses résultats significatifs (trois premières tables finales en 6 mois) donnent des idées aux autres. Ludovic Lacay tente aussi l’expérience et gagne son 1er titre majeur. De nombreux joueurs vont alors faire appel aux services de Pier : Davidi Kitai, Sylvain Loosli, Fabrice Soulier, Gaëlle Baumann, Ludovic Riehl, Tristan Clémençon, Nicolas Levi, et de nombreux joueurs online. Pier coache maintenant depuis plus de 15 ans des sportifs, joueurs de poker, cadres et dirigeants d’entreprise, tout en dispensant des formations pour le compte de grandes sociétés. Pier a écrit en 2013 avec son associé Jean-Marc Sabatier un livre qui explique leur approche et leur méthode : « La force du mental » aux éditions Dunod. Vous pouvez retrouver ses formations spéciales pour les joueurs de poker sur son site internet : www.celionscoaching.com.

 

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