ITW Anthony Lerust 2/2 : « J'en ai bavé, mais mon travail est aujourd’hui récompensé »


ITW Anthony Lerust 2/2 : « J'en ai bavé, mais mon travail est aujourd’hui récompensé »

LivePoker s'est entretenu en exclusivité avec l'un des nouveaux cracks du poker tricolore, révélé grà¢ce à  une huitième place au Main Event de l'EPT Deauville. Deuxième partie de notre interview.


La première partie de l'interview

Deuxième partie

Quels sont tes projets pour l’avenir ?

J’ai totalement changé d’optique depuis l’EPT. J’ai un projet, je vais rentrer chez moi au Portugal à Albufeira avec un ami à moi. On compte lancer un petit truc en bord de mer, pour avoir une autre activité à côté. On a quelques idées qu’on va finaliser pour fin mars. Je veux me concentrer sur autre chose et ne pas laisser le poker au premier plan, j’aurai toujours cette déception de la table finale. Je compte arrêter le grind la semaine. J’ai juste envie de faire mes sessions du dimanche et du lundi et mes tournois live, de jouer sans obligation de résultats. Le poker ne nous nourrira pas pour le restant de nos jours.

T’es-tu quand même offert une petite folie avec tes gains de l'EPT ?

J’ai fait une grosse soirée en sortant de Deauville, car il y a une chose vraiment importante qui m’a beaucoup aidé… J’ai beaucoup de soutien, mais dans ces moments-là où tu vas peux être changer ta vie, toute ma famille a fait le déplacement : ils n’ont pas été travailler tout comme mes amis qui sont venus de Toulouse, du Cap d’Agde, de Paris, j’en ai deux qui ont pris l’avion du Portugal dans la nuit…C’était vraiment incroyable. Dans l’euphorie de la TF, j’étais concentré mais après je me suis rendu compte que beaucoup de personnes qui n’étaient pas dans le milieu du poker étaient venues me soutenir. Elles étaient encore plus triste que moi quand j’ai sauté…C’est vraiment magique. Du coup j’ai dit : « On ne va pas se morfondre, on va faire la fête. » J’ai fait une soirée de malade dont je me souviendrai toujours. Je me sentais obligé de vivre ça avec eux… L’heure suivant ma sortie était vraiment dure, mais après j’ai relativisé avec mes amis. Je n’ai vraiment réalisé que lorsque je suis revenu de Gruissan.

Tu n'as pas eu un parcours facile pour percer dans le poker jusqu’à ce deep run sur l’EPT. Peux-tu revenir sur ta carrière ?

Cela fait trois ans et demi que je ne fais que du poker et quatre ans et demi que j’ai touché ma première carte. Avant j’étais vendeur animalier, puis boulanger. J’ai eu des problèmes avec mon patron qui s’est très mal comporté avec moi, j’ai tout stoppé et j’ai été au chômage pendant 4-5 mois. J’ai essayé de jouer au poker et au final j’ai gagné mon salaire le premier mois en cash-game live, en 5/5€. Je me suis dit pourquoi ne pas continuer, je me suis dit que j’allais mettre un peu d’argent de côté, jusqu'à monter une bankroll pour voyager. Un an après, j’ai commencé les MTT sur le Net. J’avais 2000 FPP sur mon compte : je me suis lancé le défi de ne jamais cash-in, et j’ai réussi. J’ai commencé avec rien, 20 € de tickets, et j’en ai fait plus de 100.000 €. J’ai géré mon argent pour ne jamais être à zéro, en micro-limites, jusqu'à une perf’ à 6000 € sur un Micro Series de PokerStars.

Ensuite j’ai construit ma team, et ça a été l’ascension, j’ai commencé à avoir de très bon résultats. Le 1er septembre dernier, je suis parti habiter au Portugal avec mon ami Pierre Morin pour des raisons fiscales et pour la vie de tous les jours. Pierre est vraiment un frère, il ne m’a pas lâché de tout l’EPT alors qu’il avait 0% sur ma main, je l’ai fait rêver comme je n’ai jamais fait rêver personne. En septembre, j’étais rasé, il me restait 3000 € dans la poche, il m’a emmené au Portugal en me disant « je sais que tu es bon, que tu vas t’en sortir ». Et j’ai monté 180.000 € depuis lors... en staking bien sûr. Je vis du poker depuis quatre ans. J’ai vécu les hauts et les bas, surtout les bas, et je peux dire qu’ils sont très difficiles. Online j’ai eu des périodes difficiles, mais ça n’est jamais arrivé sur le live et le online en même temps. Après en avoir bien bavé, tout mon travail est aujourd’hui récompensé.  

As-tu le sentiment d’avoir progressé malgré tout dans ces moments difficiles ?

Oui, bien sûr. J’essaie de prendre un peu de recul sur mon jeu. Je connais des très bons joueurs donc je demande beaucoup de conseils. En règle générale, je pense que mon jeu est plutôt correct, mais il y a certains coups préflop que je faisait avant et qui n’étaient pas forcément bons. Aujourd’hui je gère mieux, je pense à la gestion des blocs, des choses que j’ai ajouté à mon arsenal. Le poker est un travail permanent. J’avais un jeu beaucoup trop online. Maintenant j’ai deux jeux différents bien finalisés.

Le staking a d’ailleurs été une étape indispensable pour toi…

Sur la plupart de mes résultats je suis staké à 50%, mais ça me permet de jouer mon jeu. Le rapport à l’argent me bloquait, je m’en suis détaché. Je préfère que ça rentre à moitié que ça ne rentre pas du tout. Je ne fais pas les comptes après la session, mais après la fin du programme. Et ce qui est important à ce jeu, c’est la gestion de bankroll. Oui, j’ai shooté un EPT que je n'étais pas censé faire, mais j’étais un peu en freeroll.

J’ai validé un pack à 2500 € en septembre, et j’ai mis 1000 € de ma poche. Il me restait 2000 € pour vivre. Mais j’ai pu jouer tous les events, et j’ai deal un tournoi FCOOP à cinq left. Sincèrement, je n’ai jamais regardé le lobby, le payout. Lors du FCOOP, je l’ai regardé à trois lefts, pareil sur le Winamax Series ou l’EPT : les seules informations que j’avais, c’était sur LivePoker quand vous annonciez que le huitième était assuré d’empocher 64.000 €. Quand on a la moitié, ça ne sert à rien de regarder. Et si tu n’as que 3k dans la poche et que tu joues pour des paliers à 40.000 €, tu ne vas pas bien le vivre.

Envisages-tu de jouer sans staking dans le futur ?

Non, je n’arrête pas le staking, c’est EV+. En live, c’est indispensable. Par contre, je le ferai pour des plus gros events. Je continuerai à faire mes programmes, comme pour les FCOOP. Le jour où j’aurai 500.000 €, je ferais des EPT, même si maintenant je pense que je vais jouer Deauville tous les ans.

Tu souhaites parler de la Team des Sharkuteurs…

Je suis vraiment très fier de ma Team. J’ai monté une équipe de joueurs avec un ami à moi. On est cinq joueurs aujourd’hui : Anthony Cierco, Clément Van Driesshe, Tristan et "Dano". On fait des gros résultats en ce moment. Il y en a toujours un qui perfe. Ils me font tous rêver, ils se donnent à fond, ils le méritent. C’est juste incroyable. C’est ma grande fierté à ce jeu, on est vraiment très proches, ils sont comme des membres de ma famille.

Profites-tu de cette coloc’ poker au Portugal pour grinder sur le .com ?

J’ai un staking sur le .com, mais je n’ai pas encore claqué la grosse perf'. J’ai fait beaucoup de deep runs, des 25e places sur des fields à 3000 joueurs. J’ai gagné un 33 $ Six-Max très sharky, mais tu ne fais pas d’écart avec ça. Sur le .fr, tu peux faire trois « one time » par an, mais sur le .com c’est un ou deux au maximum car les fields sont monstrueux. C’est mon seul stacking qui est down pour l’instant, donc je compte bien m’y remettre en mars quand je rentrerai au Portugal pour que le staking soit up et pour garder ma bonne réputation. Mais en attendant les FCOOP, je vais faire un gros break online.

Quels sont tes objectifs pour 2014 ?

Déjà c’est le classement LivePoker, un très bel objectif. Je n’ai pas l’intention de finir premier, mais je veux voir comment peut se passer cette année, car en 2013 j’étais rasé, j’ai dû perdre 50.000 € dans l’année. Je serais sur des buy-ins maximum de 500 € ou 1000 € en live et sur les Series online. Je vais avoir pour objectif de montrer ce que je vaux en live, tout en continuant à maintenir ma régularité sur le Net.

Propos recueillis par Maxime Arnou

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