ITW Harry Loria : « Je suis représentatif du joueur français moyen »


ITW Harry Loria : « Je suis représentatif du joueur français moyen »

Interview exclusive du nouvel ambassadeur d'EuroPoker.fr.


Le premier ambassadeur français d’EuroPoker.fr, c’est lui ! Figure du circuit live français mais inconnu à l’échelle internationale, Harry Loria réalise donc le rêve de nombreux joueurs en quête de sponsor. Conscient de ses limites mais avide de progression, "Ace Dan" compte bien donner le maximum pour faire honneur à la confiance qui lui a été accordée, en utilisant notamment son image de sympathique livetard. Rencontre avec un veinard qui malgré son nouveau statut ne veut pas tout sacrifier pour le jeu…

Bonjour Harry, tu es donc le nouvel ambassadeur d’EuroPoker.fr. Peux-tu te présenter à nos internautes ?

J’ai débuté fin 2010 par des petits tournois au Cercle Wagram, puis je suis passé à l’ACF. Dans la vie de tous les jours je suis agent immobilier dans le 94. J’ai divorcé en janvier 2011 et ça m’a permis d’avoir une vie de « célibataire », et de me consacrer une à deux fois par semaine au poker en live. Au poker de tournoi je précise, je ne fais pas de cash-game car je suis un piètre joueur et je suis compétiteur dans l'âme, et je ne sais pas jouer à l’Omaha. J’ai commencé à y prendre goût et à faire des petits résultats sur les tournois réguliers de l’ACF. Je ne suis pas un joueur du net, j’y ai joué quelquefois mais mon plaisir de joueur c’est de voir mes adversaires, d’essayer de sentir les émotions, le côté humain. Je ne peux pas jouer devant un ordinateur. Je suis un livetard du poker et je le revendique.

Tu sembles d'ailleurs avoir beaucoup d’amis sur le circuit…

Je suis très ami avec Philippe Ktorza, je trouve que ce gars est d’une classe incroyable, avec beaucoup de cœur. Un vrai gentleman au-delà des résultats. Il y a quelques joueurs comme ça qui sont des modèles pour moi.

Tu es donc dans une logique de progression depuis tes débuts malgré ton statut de joueur amateur ?

J’ai une petite anecdote avec Davidi Kitai. Au POP Paris, il vient à ma table et je lui passe un bluff avec une poubelle, Q-4, et je lui fais folder top paire top kicker. Il ne le prend pas très bien, il se lève de table pour fumer une clope. Il revient à table, et là j’avais sauté. Je m’étais level tout seul avec K-Q contre A-K face à un joueur solide. Quand il est revenu, il a demandé où j’étais passé. C’est symbolique de ces joueurs-là, il sait se lever, temporiser, boire un coup et ne pas rester dans l’énervement ou une bataille d’ego. Alors que moi j'étais tellement excité et galvanisé par ce bluff que je me prenais pour le meilleur du monde. J'étais admiratif de ce comportement, et je fais comme lui maintenant.

Quand tu as des comptes à rendre, que tu tombes sur des fishs qui font des bluffs incroyables à tapis, tu joues ton tournoi et tu ne peux pas te permettre de faire des hero calls. Tu as une sorte d’obligation de résultat. Par exemple au FPS à Cannes, un mec m’a passé deux bluffs d'affilée et m’a jeté ses cartes à la gueule… Il m'a mis en tilt, mais j'ai réussi à ne pas rentrer dans ce jeu-là, à maitriser mes émotions, à ne pas me dire "Faut que je sorte ce gars-là". Le poker live est très éprouvant pour les nerfs et je trouve ça assez exceptionnel de pouvoir se contrôler. C’est ça qui me plaît dans le poker.

Tu es donc assez axé sur la psychologie...

Pour un impulsif comme moi, ça me permet de travailler sur mes nerfs. Je me sers du poker pour améliorer mon comportement dans la vie de tous les jours. Je suis toujours cordial à table, je dis bonne chance au joueur qui m'élimine. Je ne suis pas du genre à faire des slowrolls, je trouve cette attitude dégueulasse, comme les mecs qui mettent un bad beat et tapent du poing sur la table.


As-tu déjà eu l’occasion de visiter de belles destinations poker au gré des tournois ?

Je n’ai jamais voyagé à l’étranger pour le poker. Mais j’ai participé à l’EPT de Deauville ou au DSO Cannes. Quand il y a des événements sympathiques, je prends le train ou l’avion et je vais jouer le tournoi comme pour les dernières FPS Cannes.

Tes résultats t’ont-ils permis d’accumuler une bankroll suffisante pour jouer les tournois que tu souhaites ? 

Cela me permet de faire des tournois allant jusqu’à 1500 €. Maintenant si je peux gagner un ticket pour un EPT, un event WSOP, ou pour un Event Partouche comme je l’avais fait en 2012...

« J'ai la pression »

Revenons maintenant à ta signature comme ambassadeur d'EuroPoker.fr. T’attendais-tu être contacté par un opérateur ?

On m’a approché sur Facebook au vu de quelques-uns de mes résultats. Le président d’EuroPoker, Sacha Kechichian, m’a invité à dîner et m’a dit qu’il recherchait une figure du poker, pas forcément le top des joueurs français mais un gars qui a une bonne image et qui pourrait véhiculer les valeurs d’EuroPoker sur le circuit live français. C’est une room qui n’a pas les moyens de se payer un joueur de renom, il leur fallait une sorte de joueur intermédiaire comme moi. Un joueur représentatif du joueur français moyen, qui travaille, se passionne pour le poker et fait quelques résultats. C’est sûr qu’il y a plein de joueurs qui méritent d’être sponsorisés plus que moi, comme Yoni Houri, des joueurs qui ont un meilleur bagage technique. J’avais une petite réputation, je suis un joueur enjoué et marrant à table, j’essaie de l’animer à la manière d’un Michael Fratty. J’ai une image de bon vivant.

Quelle a été ta réaction lorsqu'on t'a proposé cette collaboration ?

J’étais super content, au début je n'y croyais pas trop. Bien sûr j’ai immédiatement accepté, car pour moi c’est une chance, ça me permet de m’adonner à ma passion à moindre frais. J’ai pris ça comme un coup de pouce du destin.

Quand on tape ton nom sur Internet, on tombe sur une interview qui te donne une image de beau gosse du poker. Penses-tu que cela ait joué pour les dirigeants d'EuroPoker ?

Il y a eu cet article paru sur internet, une nana qui m’avait interviewé à l'ACF, et c’est resté sur Google. Je ne pense pas être un beau gosse du poker, je ne suis pas Brad Pitt, je ne pense pas que ça ait joué (rires). Tout de suite, le mec qui s’entretient un peu… J’aime bien prendre les gens à contrepied, alors si les gens se basent sur les apparences ça me permet de les tromper sur la teneur de mon personnage. C’est pas le fait d’être beau gosse qui va te permettre de réussir au poker.

Alors pourquoi as-tu été choisi plutôt qu'un autre ?

Je n’en sais rien. Je suis un joueur assez apprécié du circuit, j’ai des relations avec tout le monde, d’Erwann Pécheux à Quentin Lecomte. J’aime bien apprendre à leur contact, je ne suis pas le gars talentueux qui va se la raconter, je suis assez accessible. Pour représenter une marque, il faut aussi avoir une petite victoire dans un tournoi. J’ai gagné le Sat PPT de Forges-les-Eaux en 2012 avec un field assez relevé. Mais il me manque encore quelques lignes à mon palmarès pour prétendre être un joueur semi-professionnel.

Quel sera ton rôle chez EuroPoker ?

EuroPoker voulait une figure du poker live pour pouvoir agrémenter son image, et je vais utiliser cette image sur leur site. EuroPoker organise des tournois satellites pour Vegas chaque mois et mon rôle va être d’accompagner les joueurs qui ont gagné les packages. Des joueurs assez hétéroclites vont arriver, qui ne jouent que sur Internet. Je pourrais apporter à ces joueurs mon vécu sur le circuit live. EuroPoker va aussi organiser un tournoi chaque mois avec un bounty sur ma tête. Mais mon objectif sera surtout de perfer sur le circuit live. Je jouerai d’ailleurs avec les qualifiés à Vegas. On ne nous a pas tout dévoilé, mais il y aura un blog sur lequel je devrais échanger avec les autres joueurs du site.

En tant que joueur de cercle, auras-tu pour mission d'attirer les "livetards" chez EuroPoker ?

Je pense que j’aurai un impact là-dessus car j’ai de bonnes relations avec les joueurs sur le circuit. J’ai déjà des questionnements de joueurs live qui ne connaissaient pas EuroPoker. Je vais essayer de ramener des joueurs du live sur le site.

Avec ce partenariat, tu vas être obligé de te mettre au poker online...

Je vais m’y mettre un peu plus sans délaisser pour autant le live car c’est ce qui m’intéresse. Je pense que les jeunes joueurs du Net ont un bagage technique supérieur à des joueurs comme moi, mais ils ont certaines lacunes quand ils se retrouvent en live. La plupart des joueurs du Net ne regardent que leurs cartes, leur position, leurs sizings… Des fois ils ne lèvent même pas la tête pour regarder leurs adversaires, ce qui est impensable.

Quels sont les tournois que tu as coché sur ton futur programme ?

Je devrais faire un tournoi hebdomadaire sur le site et les tournois au Palazzo à Vegas avec les buy-ins payés. J’ai aussi un rôle représentatif avec le logo EuroPoker sur les tournois live. J’ai la pression, mais j’espère être à la hauteur. EuroPoker m’a demandé de choisir les tournois auxquels je veux participer en fonction de mon emploi du temps. Je pense faire les FPS Paris et les Sides aux WSOPE et au WPT Paris. Je vais tenter de me qualifier pour les Main Events.

Quels sont les termes de ton contrat ?

Pour l’instant mon contrat dure un an, jusqu’à la fin 2014. On avisera ensuite. Mais je ne fais pas ça pour l’argent. J’ai la même approche que le président d’EuroPoker. Le site me laisse l’ensemble de mes gains, ce n’est pas du staking. Ils ont une bonne mentalité, sympathique. Sacha est carré, il respecte toutes les réglementations de l’Arjel, ils m’ont tenu un langage de vérité. Je suis très droit dans la vie de tous les jours donc ça me va.

Et au niveau financier ?

Joker ! Il ne s’agit pas d’un contrat hyper important mais il est important sur le plan moral. Si les résultats le permettent et si la room prend de l'ampleur, évidemment on sera enclin à renouveler le partenariat et à augmenter les chiffres ! Je vais pouvoir faire l’EPT Deauville en janvier. EuoPoker prendra en charge les 500 € ou 1500 €…

« Aujourd’hui, j’ai envie d’être premier »

Ce contrat va-t-il te libérer de la pression de l'argent ?

Je pense que je vais pouvoir me libérer dans mon jeu. La pression de l’argent je ne l’avais pas trop car la plupart du temps je gagnais mes tickets par des satellites, ou j'utilisais mes gains pour me payer des tournois. Je n’ai jamais joué en empruntant de l’argent à droite à gauche. Jouer scared money n’est pas dans mon tempérament. Sinon ce n’est plus un plaisir.

Penses-tu que tu vas dorénavant axer davantage ta vie vers le poker ?

Ma vie personelle est importante, je suis papa d’un petit garçon et je ne veux pas le délaisser pour le poker. Le poker est assez addictif, je veux conserver une bonne hygiène de vie. Et il faut garder la valeur du travail en dehors du poker. J’ai envie de me limiter moi-même, car si je m’écoutais je participerai à tous les events, comme d’autres joueurs sponsorisés qui vivent leur truc à fond. Je ne veux pas tout foutre en l’air pour ça, mais je pense quand même m’investir un peu plus qu’avant.

Existe-il un tournoi qui te fasse particulièrement rêver ?

L’EPT Deauville. 
Ça fait deux ans que je le fais et je le rate jamais. Aux prochaines WSOP je vais faire les Sides à 1000 $ et 1500 $, je n’ai pas envie d’en demander trop à ma room. Mais il faut absolument être présent sur la fin de l’année 2013 : à l’Aviation Club de France j’ai le classement des tournois à tenir, pour l’instant je suis 4ème, j’aimerai bien me rapprocher des premières places et essayer de faire un "one time" sur les FPS par exemple.

D’où vient ton surnom "Ace Dan" ?

Mon fils s’appelle Dan, c’est aussi simple que ça ! C’est mon véritable moteur dans la vie. J’ai toujours la photo de mon fils sur mes cartes, c’est mon porte-bonheur, je joue aussi pour lui, je suis fier de lui montrer quand j’ai gagné.

Quels sont véritablement tes objectifs dans le poker ? 

J’ai une courte expérience au poker, mais j’ai tout connu ! J’ai vraiment vibré avec les meilleurs joueurs de la planète, c'était un kiff de jouer avec David Williams, Michael Mizrachi ou Davidi Kitai, qui est mon idole en poker live. J’admire aussi des joueurs sur le circuit français qui sont solides comme Alain Goldberg, Johnny N’Guyen, qui ne sont pas très connus mais qui sont de supers joueurs. J'ai aussi joué avec des
 nullards, des fishs, j'ai connu la joie et l’euphorie d’être chipleader au BPT Enghien avant de tout spew et de finir au bord des places payées, ce qui est la pire sensation pour un joueur de poker. J'ai connu la victoire dans un Main Event, ce qui est magique. J’ai connu le spew, l’énervement, j‘ai commis toutes les erreurs au poker. J’ai une bonne expérience du live. Une fois que tu as connu la victoire, tout change. Aujourd’hui, je ne veux plus me contenter des deuxièmes ou troisièmes places. J’ai envie d’être premier. J’étais hyper déçu aux Summer Series après avoir perdu contre Omar Lakhdari en heads-up du 1000 €, car j’étais souvent devant à tapis...

Te sens-tu complètement prêt à assumer le rôle de représentant d'une room ?

Oui, car je ne fais plus les mêmes erreurs. J’ai eu une grosse désillusion à Enghien, où je fais une grosse erreur contre Ronan Monfort. Derrière je me suis remis en question. J’ai même voulu arrêter le poker car être chipleader dans un tournoi comme ça et spew derrière… Je suis un débutant confirmé, j’ai encore beaucoup de choses à apprendre.

Propos recueillis par Maxime Arnou

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