ITW Rémy Biechel (2ème partie) : « Le sponsoring n’est pas basé sur les résultats »


ITW Rémy Biechel (2ème partie) : « Le sponsoring n’est pas basé sur les résultats »

Suite et fin de l’interview de Rémy Biechel


 
Retrouvez la première partie de l’interview de Rémy ICI.

Tu es un pilier de la Team Pro BarrièrePoker. Quel rôle y joues-tu ?

L’année dernière, nous étions tous au même niveau. Comme je suis le plus vieux, j’essaye de faire comprendre aux plus jeunes qu’il y a des règles à respecter, des choses à faire. Cette année, je vais jouer plus le rôle de capitaine. Je ne veux pas me surévaluer, je suis relativement souple et je veux que tout le monde soit un électron libre. Je vais servir d’interlocuteur entre la direction et la Team, et ce n’est pas facile à gérer. Quand on est jeune, on manque d’expérience, on pense qu’on est un héros parce qu’on joue au poker, qu’on doit tout de suite être mis en avant, alors que ce n’est pas du tout le cas ! La room doit fonctionner, mais nous nous ne sommes rien à côté ! Ça me plait d’avoir ce rôle car ça me donne des responsabilités. Je dois faire en sorte que la Team Barrière soit harmonieuse, et que chacun remplisse son rôle. Il y a des dérapages à ne pas faire, et tout le monde dans la Team à l’air d’apprécier, car ils ont tous la tête sur les épaules. On a des obligations pour le blog de la Team:  au départ je n’aimais pas du tout, je ne suis pas très bon en orthographe, mais j’ai une personne qui arrive à me corriger ! Etrangement, j’ai pris l’habitude. Et maintenant que je suis le capitaine, on me reprend dans les articles.. Je n’ai jamais pris cela comme une obligation, ça fait partie de notre rôle. On est bien lotis. Ce que je ne supporte pas, ce sont les dérives. On représente Barriere et la Française des Jeux. Ils sont regardants sur l’humilité, le respect, la politesse. 

Comment s’est passé la séparation avec Benjamin Pollak, Guillaume Cescut et Lucille Cailly lorqu’ils ont quitté la Team Pro BarrièrePoker?

Ça a été un choix de la direction : aujourd’hui on ne peut pas avoir une team de neuf joueurs. Economiquement parlant, ça ne marche pas. Je ne serai pas surpris que ce soit la même chose chez Winamax un jour. Leur départ m’a embêté pour eux. Ce sont des gens que je connaissais avant, c’est toujours dur que des gens s’en aillent. Il y avait deux sortes de contrats, certains plus long que d’autres, les plus courts n’ont pas été reconduits. A un moment donné, il n’y avait plus de budget. La Team avait de bons résultats, comme Benjamin ou Guillaume, et moi qui ne faisait rien... J’imagine qu’il y a pu avoir un sentiment d’injustice. Malheureusement, ils sont arrivés au mauvais moment. Globalement, ça s’est bien terminé. Ils sont tous en bons termes. Il n’y a pas eu de problèmes. Ils étaient déçus, c’est sûr. J’aurai préféré qu’on termine ensemble, mais je ne peux rien faire. Je ne serai pas étonné que certains retrouvent un sponsor, comme Benjamin par exemple.

Pourquoi selon toi as-tu été conservé ?

Mon contrat courait jusqu’à fin 2011. On a commencé à discuter il y a deux mois. Ils ont décidé de garder tout le monde car il ne restait plus que la moitié de la Team. J’ai quand même certains résultats sur Hendon, ça fait longtemps que je suis dans le milieu, j’ai rempli tout ce qu’on m’a demandé, je m’entends bien avec tout le monde. Humblement, ça aide. C’est mieux si la communauté t’apprécie. Moi je ne fait pas d’efforts là-dessus, c’est mon naturel. Je vibre pour ce jeu. Il y a une chose essentielle : le sponsoring n’est pas basé sur les résultats. Aujourd’hui, si tu prends Beckham au PSG, c’est pour vendre des maillots. Mon image est moins bonne depuis deux ans car on parle moins de moi en raison de mes résultats. Au niveau du contrat, je me sens bien. Pour ne rien te cacher, chez Barrière, le début n’est pas aussi bon que ça aurait pu l’être. Je suis très content de mon contrat. Il n’y pas que l’argent, il y a aussi l’histoire, et j’espère qu’elle sera belle. Je préfère être au début de l’histoire que de partir ailleurs. On est bien, il faut voir dans le futur, on aura peut-être de meilleurs contrats après. On est pratiquement au même niveau par rapport au précédent contrat, même si tout a été revu un tout petit peu à la baisse (rires). Tout le monde doit faire des efforts…

Tu étais sponsorisé chez PartyPoker avant de signer chez Barrière. Quelles sont les différences entre tes deux contrats ?

C’est différent car avant j’étais le seul joueur français. J’étais relativement isolé, mais tout s’est très bien passé. A un moment, ils ont changé leur direction. A la fin de mon contrat, ils ont voulu revoir mon contrat avec une baisse de 30% et on ne s’est pas mis d’accord. Party avait donné ce que je voulais, au début, mais là je préférais encore aller jouer à l’Aviation ! Je savais pertinemment que le .fr allait ouvrir et j’ai misé sur le fait que j’allais retrouver quelque chose. J’avais des obligations, comme jouer un certain nombre d’heures sur internet. Je n’étais pas très bon, je perdais à l’époque alors que j’étais obligé de jouer à une certaine limite que je n’arrivais pas à battre. Ça aurait pu me coûter cher... J’ai toujours su ce que je voulais. A l’époque, j’ai refusé pratiquement toutes les rooms. Je sais ce qu’il faut pour bien travailler au niveau d’une équipe. Je suis content d’être sponso, mais ce n’est pas une fin en soi. Si tu ne resignes pas, il y a pas mort d’homme. Ça fait deux ans que je suis sponso, et je gagne moins d’argent qu’avant. Mon espérance de gain est plus importante maintenant ! Sincèrement, l’écart est très faible entre ce que je touchais chez Party et ce que je touche chez Barriere.

Pourra t-on te voir dans de nouvelles vidéos, comme dans la série « Mental de pro » ?

A priori, non. Là on est en train de revoir le marketing. Je ne sais pas ce qu’il va se passer à l’avenir. « Mental de pro », ça s’est terminé à un moment. Avant on faisait beaucoup de com’ autour d’une Team. Maintenant ça se fait par des cadeaux, des points de fidélité.

« Entre tous les bons joueurs, certains ont les bons setups et d’autres pas » 

Tu es très actif au sein de la communauté poker. Ressens-tu le besoin de partager tes émotions ?

En fait, ca me permet d’évacuer un stress et à un moment donné j’ai commencé à poster un peu plus pour expliquer ce que je vivais, mes coups, pour me justifier. Ça me permet de me crédibiliser. Puis comme je joue plus souvent online, je suis chez moi avec Facebook à côté, et comme les gens ont l’air d’apprécier… Ça me sert aussi à faire de la com’. Je prends à cœur mon rôle. C’est important pour moi de contribuer à dire qu’il y a des tournois sur Barrière. Ça permet aussi aux proches qui veulent me suivre d'avoir une source d’info. Dans les coverages, on parle des joueurs sponsos à la fin de leurs tournois, mais j’aime pas la fin (rires). Quand je fais des tournois, je fais mon petit coverage, j’essaye de twitter tous les soirs.

Tu t’es donc mis au cash-game online. Comment cela se passe-t-il pour toi ?

Ça s’est bien pensé en fin d’année 2011. Là c’est un truc de fou, j’ai vécu un vrai cauchemar. Je suis passé de 500 € à 20.000 €, j’étais à 24.000 € au max, et j’ai perdu 4000. Dès que j’ai perdu deux caves, je suis redescendu de limite en attendant que ca passe. Il faut jouer beaucoup de mains, savoir choisir les joueurs contre qui tu joues. Dans ces limites-là, les gagnants vont gagner par rapport au revenu mais aussi par rapport au rake. Moi, je n’ai pas pris plus de rakeback d’un autre. Si tu n’es pas assez bon, il faut prendre un coach. Au poker tout le monde est meilleur que tout le monde. J’espère continuer à monter de limites en 2012.

Qu’est ce qui fait la différence aujourd’hui selon toi entre un joueur qui fait des résultats et un joueur qui a plus de difficultés ?

En live, on se rapproche du loto. Il y a des gens qui gagneront toujours. Entre tous les bons joueurs, certains ont les bons setups et d’autres pas. On peut dire ce qu’on voudra, quand tu perds avec les As contre Valet-Dame parce que ton adversaire touche deux valets… C’est très important de faire les bons choix, de ne pas faire de fautes. Il ne faut pas jouer de gros pots contre les mauvais joueurs. Il faut commettre le moins d’erreurs possibles… Sur dix ans, on verra qui sera encore là. Mercier ou McPhee sont des génies, donc ils ont le contrat de sponsoring qui va avec leur niveau, mais ils jouent plus de tournois que tout le monde. Quand je gagnais, je remontais dans des coups où j’étais derrière. Saout a terminé 3ème du Main Event des WSOP car il a vu du jeu pendant cinq jours. Quand tu es du mauvais coté de la variance, tu subis. 

Quels sont tes bonnes résolutions pour 2012 ?

En 2012, je suis chaud bouillant pour retourner la variance. Je veux retrouver mon statut d’avant, un joueur sponsorisé avec les résultats qui vont avec. Ça me tient à cœur. Je veux faire du mieux possible et continuer à me faire plaisir. Je veux qu’on parle de moi pour mes résultats. Je vais essayer de faire un peu plus de sport. Globalement, j’ai une bonne hygiène de vie. Je dois transformer les bulles en ITM, ce sera déjà pas mal. En 2012, ça va envoyer. Si je fais deux bons premiers mois, tu peux miser sur moi. Sinon il va falloir s’accrocher…

Il y a deux ans, tu disais que tu voulais arrêter le poker dans cinq ans. Est-ce toujours d’actualité ?

Tout à fait. J’ai passé deux mauvaises années. On verra ce qui se passera après 2014. Il faudra que tout se passe bien : si je ne prends plus de plaisir ou que mon sponsor n’a plus confiance en moi, je préfère changer la donne. Je suis toujours en confiance, je me donne trois bonnes années et je ferais le point. Je pense que je serai capable d’arrêter. A un moment, je partirai à la retraite pour laisser la place aux autres ! Sinon je serai encore là, mais pas au même rythme. Il y a plein de choses à faire, s’occuper de son appartement, appeler le plombier… Le golf me tente un peu aussi…

Propos recueillis par Maxime Arnou
 

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